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j’y compte ; elle est mon seul bien. À côté de vous, j’aime la vie ; je la sais grande, heureuse, vraie. Sans vous, loin de vous… » ses traits s’altérèrent, et il murmura… « je ne la supporterais pas ! »

Que pouvait-il dire déplus ? Rien sans doute ; et cependant elle vit qu’il était si loin, dans sa pensée, de prétendre à leur union, qu’elle se sentit embarrassée pour répondre. Au moins, eût-elle voulu tendre la main à Louis. Mais cette main, tout à l’heure il l’avait baisée ; elle ne l’osa donc pas, et des larmes lui vinrent aux yeux de sa gaucherie.

Elle n’avait plus d’hésitation cependant, car elle avait compris toute la valeur de cette âme aimante et forte. Il avait complétement, peu à peu, gagné son cœur ; elle ne rêvait que de lui rendre au centuple tous les bonheurs qu’il n’avait point goûtés, et se chargeait, à son égard, de justifier Dieu. Que craignait-il donc ? et d’où venait ce nuage qu’elle souffrait de voir encore sur son front ?

Les derniers rayons avaient disparu. Lucien et Lilia revenaient ; on prit le chemin de la maison. Lucien était pensif et soucieux, car sa cousine venait de lui apprendre les bruits répandus contre sa sœur et contre lui-même à propos de Louis de Pontvigail, et il s’accusait d’oubli, d’imprudence, en même temps qu’il éprouvait une vive irritation de ces odieuses attaques.

Jusqu’à quel point Louis et Cécile pouvaient-ils s’aimer ? Absorbé par ses peines, il n’avait rien observé. Il pensait pourtant que ce serait pour Cécile un étrange mari que cet homme excellent et digne, mais bizarre, banni de la maison paternelle et dés-