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ses couleurs ; Cécile s’était assise près de lui sur un talus, et Louis, qui la suivait constamment, s’était placé près d’elle ; tandis que, sous prétexte de se composer un bouquet des dernières fleurs de l’année, Lilia passait et repassait à chaque instant sous les yeux du peintre. Bientôt les regards de Lucien cessèrent de se porter sur le paysage pour suivre les mouvements gracieux de la jeune femme.

« Parbleu ! j’ai les doigts engourdis, » s’écria-t-il un instant après ; et, déposant la palette, il se dirigea vers sa cousine, qui, à ce moment, pendue une chèvre aux haies, s’efforçait vainement d’atteindre un petit liseron frileux, éclos sous un dernier rayon au bout de sa liane.

Ce n’était guère cependant pour le peintre le moment d’abandonner sa toile, à moins que ce ne fût par désespoir de son impuissance à rendre d’inimitables beautés. Le soleil au haut du coteau semblait tournoyer en s’abaissant, et sa surface éblouissante prenait des reflets métalliques d’or ou de platine en fusion.

La lumière lentement se retirait des bois, chauds encore et dorés de ses étreintes, et de toutes parts on sentait, comme une grande âme douce et mélancolique, l’âme du soir, qui se répandait et s’insinuait pénétrante dans tous les êtres. Louis, depuis quelque temps, la tête sur sa main, restait silencieux et semblait triste. Qu’avait-il ?

« Vous voilà bien rêveur, ami, » dit Cécile en posant la main sur le bras de son compagnon.

Il saisit aussitôt cette main et la pressa de ses lèvres. C’était la première fois qu’il avait tant de