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couché à ses pieds, attachait sur elle un regard confiant et doux. Lucien était dans son atelier ; on ne l’y dérangeait pas, et sa sœur l’en excusa.

« Mais vous le verriez, ajouta-t-elle, si vous vouliez dîner avec nous. »

Louis refusa d’abord ; mais, la jeune fille insistant, il se laissa vaincre. De plus en plus, le sauvage s’apprivoisait ; il était si heureux de voir et d’entendre Cécile, qu’il en perdait cette timidité farouche qui était devenue comme le fond de sa nature.

Vrai de cœur en toutes choses, il restait simple ; et s’il manquait parfois à l’usage, c’était avec une sorte de distinction native qui excluait toute grossièreté, même la gaucherie.

Une seule pensée, d’ailleurs, le préoccupait vraiment : c’était de cacher la profondeur de l’impression que Cécile faisait sur lui. Il s’enivrait silencieusement de la voir et de l’entendre, et quand il paraissait distrait, c’est alors que son émotion était le plus vive. Cécile cependant la devinait.

C’est que, en dehors de la parole, il existe entre toutes les créatures humaines un système non exploré de communications secrètes, en vertu duquel nous exerçons les uns sur les autres, par le seul fait de notre présence, telle ou telle impression d’attrait ou de répulsion, de confiance ou de crainte, d’aise ou de malaise, plus ou moins sentis.

Ces impressions, trop subtiles pour que nos sens les perçoivent avec netteté, résultent évidemment de tout ce qui dans l’être est révélation extérieure de sa nature, peut-être des émanations de la pensée. Celles-ci ne peuvent s’adresser qu’au sens intérieur ;