Page:Leo - L Ideal au village.pdf/232

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’elle n’hésite pas. Si je le croyais ! Mais les femmes ont la rage de certaines vertus… à certains moments. Elle ne doit pas braver son père, me dit-elle. Peuh ! n’est-elle pas majeure ? Qu’elle me suive, et nous verrons bien ensuite s’il refusera.

— Tu voudrais l’enlever ! » s’écria Cécile.

Son frère ne répondit pas.

« Mon ami, je t’en supplie, reprit-elle, pas de coup de tête. Sache attendre. Si Rose t’aime véritablement, elle saura bien se garder à toi. Ce serait une double imprudence que de brusquer ainsi les choses et forcer les volontés dans un mariage… où déjà les inconvénients ne manquent pas.

— Lesquels ? demanda Lucien irrité.

— Oh !… peu de chose, s’il est vrai que vous vous conveniez parfaitement elle et toi ; mais, dans le cas contraire, de nouveaux dégoûts, qui te rendraient peut-être la situation insupportable ; sa famille, le père surtout…

— Eh ! s’écria-t-il, à qui le dis-tu ? Cet homme, il me répugne et je le hais presque ! N’a-t-il pas exigé de l’argent pour ces séances, réduisant ainsi sa fille au rang de modèle payé ! Eh bien, que veux-tu ? je suis amoureux, amoureux fou ! Tu ne comprends pas cela, toi ? L’amour fraternel, c’est bon, c’est charmant, sacré ! tu sais bien pourtant que ce n’est pas toute la vie. Je te l’ai dit, je pensais à me marier ; mais à Paris j’avais peur rien que d’y songer, étant pauvre ; ici, au milieu de ces champs, de ces bois, de cette poésie, ça ne pouvait pas manquer. N’est-elle pas belle comme un rêve de peintre ? Et honnête, et pure ! car, entourée de