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comble, pour extraire les racines odieuses de l’esclavage et en arracher tous les rejets.

« L’égalité, c’est-à-dire le droit de chacun pris pour base de la justice, est proclamée, et la volonté du bien et du juste n’est plus la hardiesse de quelques-uns, mais la prétention de tous. Ne voyez-vous pas en ceci la preuve que le mal n’est pas l’amour sauvage des actions mauvaises, mais une simple lacune du sens moral qui, fécondé par la connaissance, se développe à mesure que l’humanité grandit ?

« D’où vient le dissentiment entre vous et les aveugles qui ne vous ont pas compris ? De la supériorité de votre sens moral sur le leur. Votre irritation contre eux est-elle donc bien juste ? N’est-ce pas un malheur à eux, plutôt qu’un crime, de n’en pas être encore à votre hauteur ? Ils y arriveront plus tard, soit par eux-mêmes, soit par le progrès général, et c’est à vous de les appeler pour hâter leur marche ; mais sans colère. Apôtre impatient, vous avez aveuglé de rayons ce peuple, et il n’a rien vu. Tendez-lui votre main, et, s’il veut bien vous donner la sienne, marchez doucement, de son pas à lui, pour qu’il puisse marcher avec vous.

« La plupart des hommes ne sont que de grands enfants. Il me semble qu’en disant l’humanité vieille, on se trompe ; elle ne l’est point. Ce n’est pas une question de chronologie. Nous mesurons le temps à la vivacité de notre désir et à la rapidité de la vie individuelle ; mais la durée de l’enfance est toujours proportionnée à la grandeur de l’être ; tant de faiblesse est donc la preuve d’un avenir infini.