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eu en ceci un tort égal. Ce n’est pas d’impression particulières que l’on doit partir pour atteindre à un jugement sérieux des faits généraux ; pas plus que du sein d’un bocage on ne peut apercevoir l’horizon.

« Essayons, ami, de monter ensemble sur un sommet dégagé de ces souvenirs, de ces influences, qui feraient obstacle à notre vue. Je suis peut-être moins forte que vous, mais je suis moins lasse : donnez-moi la main. À deux, on ne s’encourage pas seulement, on se fortifie et tout d’abord ici nous rencontrons cette grande loi qui est le remède et le contre-poids de toutes nos misères… Mais d’abord, considérons le mal en lui-même, ce mal qui si vivement blesse vos instincts de justice, et qui répand la douleur dans l’humanité.

« Qu’il s’appelle conquête, meurtre, loi divine ou loi sociale, c’est toujours l’esclavage, la violence exercée par l’être sur l’être, le faux droit. L’histoire n’est qu’un long carnage, et la paix même, dans ces sociétés où le principe monarchique, partout appliqué — soit dans la famille, soit dans la vie sociale par l’esclavage, et tout aussi bien dans les républiques, — sacrifiait toujours le droit de plusieurs au pouvoir d’un seul, la paix même n’était pas moins douloureuse que la guerre.

« Mais pourquoi le mal a-t-il diminué jusqu’au degré où maintenant il existe ? Assurément, nous souffrons encore de ses effets ; nous traînons tous quelque bout de chaîne plus ou moins pesant. Mais nous n’en sommes pas moins occupés de toutes parts à fouiller notre sol, à le remuer de fond en