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mille d’un noble orgueil. Il y avait autour de sa personne quelque chose de solennel, qui rappelait le nuage d’Homère. Ceux qui marchaient près de lui lui faisaient escorte, et il était lui-même si pénétré de son importance qu’il n’était pas possible d’oublier un seul instant les droits et la valeur de ce jeune représentant d’une école d’élite. Sa façon de tenir la tête et de regarder laissait voir que le pays et ses habitants lui semblaient à peu près indignes de ses regards. De tout petits jugements très-courts, mais irrévocables, tombaient de ses lèvres négligemment, et quand il ne parlait pas, un sourire ironique posait sur sa bouche. Il daigna traiter Cécile et Lucien en gens de son monde, et tout ce qu’il dit roula sur les fêtes, les chasses, les dîners et les folies qui avaient eu lieu chez le duc.

« Paul et moi, disait-il à tout propos…

— Qui donc Paul ? demanda Lucien.

— Paul, répondit Arthur sans ouvrir la bouche, ou du moins si peu que c’était à peine, c’est mon alter ego, mon Achate, mon Pylade, le fils du duc de Paramolan.

On l’écoutait bouche béante, et Agathe aussi avidement que les autres, mais avec une sorte d’impatience qui ressemblait à du ressentiment. Elle avait les yeux un peu rouges. En l’abordant, Cécile lui avait dit à l’oreille :

« J’ai écrit à Paris ; nous aurons promptement une robe. » Et là-dessus Agathe lui avait jeté un regard éloquent, en lui serrant convulsivement la main.

Vers quatre heures, on alla se promener dans les bois pour voir une fontaine que Cécile avait décou-