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De larges gouttes d’une pluie chaude retentirent comme une grêle sur la voûte du bois.

« Qu’allons-nous devenir ? » s’écriait Agathe.

Cécile répondit gaiement :

« Cela se devine, ma chère ; nous allons nous tremper. »

Après quoi la petite reprit, plus gaiement encore, en frappant des mains :

« Nous allons nous tremper, c’est ça ! »

Ce n’était que ça, en effet, mais ça ne semblait peu de chose aux deux Loubannaises, qui, outre la terreur que l’orage leur inspirait, avaient à sauver l’existence de leurs bottines, de leurs chapeaux, de leur mantelets et de leurs ombrelles. Aussi leurs lamentations avaient-elles l’accent du désespoir.

« Hâtons-nous de sortir du bois, dit Cécile.

— Mais nous n’aurons plus d’abri.

— Il est imprudent, vous le savez bien, de rester sous les arbres pendant l’orage. »

La peur fit prévaloir cet avis, et l’on descendit en hâte le sentier.

Cependant, l’orage, amassé pendant de longues et fortes chaleurs, crevait avec furie ; la pluie, devenue torrentielle, rompit de toutes parts la voûte des feuilles, et en quelques instants le sentier que suivaient nos voyageuses devint un ruisseau jauni qui courait devant elles en barbotant sa chanson, comme s’il les défiait à la course.

« Est-ce affreux ? s’écriait Agathe. J’y renonce ; je ne puis plus avancer ; non, c’est impossible ! Marcher ainsi dans l’eau ! mes bottines sont perdues et nous allons gagner une fluxion de poitrine ! Aussi,