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Autour de ce sujet il y eut encore bien des paroles échangées que nous ne compterons pas. Mme Arsène, avec la délicatesse qu’elle possédait, fit comprendre toute la valeur du sacrifice que faisait une personne comme elle en se décidant à entrer en service. En définitive, cependant, à la grande satisfaction de toutes les parties, elle fut engagée comme bonne par Cécile au prix, exorbitant pour le pays, de vingt francs par mois.

Mme Arsène savait qu’on donnait bien plus à Paris, mais elle était trop consciencieuse pour exiger autant à Loubans que dans la capitale ; son vrai mobile d’ailleurs était le vif penchant qui l’entraînait vers Mlle Cécile. Celle-ci la trouvait bien un peu prétentieuse ; mais à cela Mme Darbault répondait que Mme Arsène était pour sa position une femme distinguée et qui avait beaucoup lu.

« En vérité ! dit Cécile ; quelle était donc sa condition autrefois ?

— Elle était établie ; ils tenaient boutique. Son mari était un maître tailleur qui a fait de mauvaises affaires, et Mme Arsène est obligée maintenant de vivre de sa couture et d’une petite rente de deux cents francs.

— J’aurais pensé, dit Mlle Marlotte en riant, qu’elle était fille ou sœur de quelque général.

— Mais il y a bien quelqu’un de remarquable dans sa famille, n’est-ce pas, Agathe ? Cet oncle dont elle parle tant.

— Oui, maman ; il était valet de chambre d’un prince d’Allemagne.

— Riez si vous voulez, reprit Mme Darbault en