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autre chose que se résigner, et Mme Arsène n’y consentait pas.

« C’est si délicat, répétait-elle, et je vois si bien ce qu’il vous faudrait : une personne tranquille, sage, polie, soigneuse, bonne cuisinière, ayant des sentiments distingués, appréciant mademoiselle et se faisant un bonheur de la servir.

— Mais, madame Arsène, dit enfin Mme Darbault, pourquoi ne serait-ce pas vous ? Je sais que vous n’avez pas l’habitude du service ; mais ma nièce est une personne raisonnable et qui aura pour vous des égards ; vous êtes veuve, sans enfants ; vous avez de la peine à vivre ; là vous seriez défrayée de tout, sans compter le gage, et ma nièce aurait avec vous toute sécurité. »

Mme Arsène baissa modestement les yeux.

« J’y avais presque pensé, madame. Ce serait un véritable bonheur pour moi de servir mademoiselle, et j’ose assurer qu’elle serait satisfaite de l’élévation de mes sentiments ; mais quoique la fortune m’ait réduite à une humble condition, l’éducation que j’ai reçue me rendrait incapable de certains travaux, que monsieur et mademoiselle ont le droit d’exiger de leurs serviteurs… »

Sommée d’expliquer ses réserves, Mme Arsène avoua qu’elle ne pourrait ni laver, ni repasser, ni porter des fardeaux, ni faire de longues courses, et que, pour tout dire, elle regardait comme au-dessus de ses forces et au-dessous de sa dignité tout travail pénible. Cécile toutefois, poussée par sa tante qui regardait Mme Arsène comme un trésor domestique, accepta ces conditions.