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roman nouveau n’est pas à l’Ile-de-France, mais en France même, dans le Poitou. Le prétendu scandale est donc beaucoup plus grand ici que là, les convenances où les conventions étant bien plus étroites dans la société soi-disant civilisée de certaines petites localités provinciales que loin du monde et de ses préjugés, au milieu d’une nature vierge.

Moralement égaux par le cœur et l’esprit, Michel et Lucie paraissent placés, socialement et d’après les idées reçues, à une distance infranchissable. Justement il s’agit de la leur faire franchir, et de faire accepter au lecteur cette situation et cette conclusion, en passant par tous les obstacles et par toutes les difficultés dont la peinture a fourni à l’auteur un tableau très-varié et très-vrai des mœurs de province. Les luttes prolongées des sentiments les plus naturels et les plus purs, aux prises avec les bienséances plus ou moins justes, les usages tout-puissants, et aussi avec la malignité, la sottise et l’envie, sont retracées dans ce livre avec finesse, avec vigueur, parfois avec une éloquence simple, courte, sans ombre de déclamation.

Si l’on peut noter, dans la forme, en ce qui regarde le langage rustique de Michel, quelque reflet des romans champêtres de George Sand, cela n’empêche pas qu’il faille reconnaître dans tout cet ouvrage un sentiment très-vif et très-personnel de la campagne et de ses habitants, avec un fonds très-riche d’observations directes.