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Ribas. Il venait voir Effisio, que je m’épuisais vainement depuis deux jours à défendre contre les visites de tout le village. Qu’allait-il arriver de cette entrevue ? Certainement Effisio parlerait du sujet qu’il avait à cœur ; mais de Ribas, tout rude qu’il était, userait sans doute de ménagement et laisserait au malade l’illusion que nous lui avions nous-mêmes conservée ?

Le premier cours de l’entretien confirma cette prévision. Effisio rappela la démarche de son oncle et, saisissant la main de Ribas, le pria de croire que s’il consentait à lui faire épouser sa fille, elle serait heureuse et qu’il acquerrait un gendre dévoué. Surpris d’une telle espérance, quand il n’en avait permis aucune, de Ribas eut d’abord un petit ricanement ; puis, se reprenant, il parla au malade comme à un enfant, lui dit de se tranquilliser et de se guérir, que c’était le principal, qu’on verrait après, et que toutes les filles à marier, y compris la sienne, ne valaient pas un brave garçon tel que lui. Puis, changeant de sujet, il questionna Effisio sur l’attaque de la diligence, et dit une parole qui me frappa au sujet des voyageuses contre lesquelles avaient eu lieu des tentatives de violence :

— Pour ça, ce n’est pas bien ; la femme et la fille du prochain doivent être respectées. Il ne trouvait pas ça bien ? Approuvait-il donc le reste ?

Mais une préoccupation plus vive m’agitait. Devais-je continuer à tromper Effisio, quand le délai pendant lequel on pouvait encore agir était si court, et quand lui seul pouvait insister ? Insister avec toute l’éloquence du sentiment ?

Ce jour-là, il se trouvait mieux ; la fièvre avait tombé ; bientôt, je vis de Ribas, embarrassé de l’équivoque à laquelle il se prêtait, sur le point de s’en aller ; mon parti fut pris.

Effisio, dis-je rapidement, je ne puis vous laisser plus longtemps dans l’erreur. Soyez courageux et plaidez vous-même votre