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qu’elle-même fasse valoir ses sentiments, sa volonté ; qu’elle prie, pleure, supplie ! On ne peut pas marier une fille contre son choix.

Mais le vieillard secouait la tête.

— Dans notre pays, on ne s’inquiète guère de ça. Si les fortunes d’Effisio et d’Antioco étaient égales, je ne dis pas ; mais entre un riche et un pauvre… J’en suis bien fâché pour mon neveu qui tient beaucoup à cette fille ; mais c’est là désormais une démarche inutile…

Il eût bien voulu ne pas la faire et je fus obligé de l’exiger, au nom de l’état d’Effisio. Je cherchai à donner à notre ambassadeur un peu d’espérance, je lui dis que nous avions foi en lui, que la destinée de son neveu était dans ses mains, et je parlai même de son éloquence, dont je n’avais pas la moindre notion. Il me promit enfin d’insister et partit d’un air découragé.

Bien qu’épuisé par la perte de beaucoup de sang et la fatigue du pansement, Effisio ne pouvait reposer ; il attendait avec anxiété le retour de son oncle. Pour l’occuper, je lui fis raconter son aventure.

À mi-chemin environ, dans un désert, où pendant six heures, de Nuoro à Silanus, on ne voit aucun village, Effisio avait aperçu d’une hauteur, aux premières lueurs de l’aube, la diligence arrêtée, le conducteur et les voyageurs luttant contre des brigands. Alors il avait mis son cheval au triple galop et tiré de loin des coups de fusil pour épouvanter la bande et lui faire croire à l’arrivée de plusieurs personnes. Tout en courant, il avait rechargé, et, parvenu à portée, avait tiré de nouveau. Un homme était tombé. Mais toute la bande fondait sur lui. Il ne pouvait plus se défendre qu’à coups de crosse et venait de recevoir une balle dans l’épaule, quand avaient paru deux carabiniera, attirés par les coups de feu. Alors les grassatori avaient ramassé l’homme blessé ou mort et étaient partis à bride abattue.

Malheureusement, la diligence était déva-