Page:Leo - Grazia.djvu/84

Cette page n’a pas encore été corrigée

ou plutôt comme s’il eût voulu se rendre compte de l’état des choses et du mobilier. Je vis un sourire dans l’œil du père de Grazia il avait compris et la perspective ne semblait pas lui déplaire — Effisio ! pauvre Effisio ! où donc était-il ?

Je me levai pour sortir ; mais de Ribas me retint et je restai pour savoir jusqu’où iraient les choses. À vrai dire, c’était de ma part trop de présomption ; si je saisissais assez de mots pour être averti du sens général de l’entretien, et même suivre ses détours, je ne parvenais point à pénétrer le sens exact de chaque phrase ; à plus forte raison, la valeur des engagements que ces deux hommes pouvaient échanger. Plusieurs fois, ils répétèrent le nom d’Antioco, dont ils firent l’éloge, puis le nom de Grazia, et j’entendis de Ribas jurer avec emphase qu’il n’y avait pas dans toute la Sardaigne une fille plus soumise, plus douce et plus attachée à ses devoirs ; elle serait la richesse et le : contentement d’uns maison, et il ne consentirait à la donner qu’à un homme capable de la rendre heureuse. Malheureusement, on sait ce que signifie cette phrase dans la bouche d’un père ambitieux ; le bonheur des filles n’est jamais que ce que les pères souhaitent.

Ils en vinrent promptement aux questions d’argent. Les biens de part et d’autre furent passés en revue : le vieillard énuméra ses terres et ses troupeaux ; de Ribas parka du trousseau pompeux qu’il préparait à sa fille. Puis, on discuta les cadeaux : couronne d’ivoire et d’or (c’est le chapelet, principal bijou des Galluriennes, tant de boutons d’or, tant en argent, chaînes et bagues, velours, soi rubans, tout fut offert, demandé ou promis, et l’entretien prit fin sur ce mot, répété par de Ribas : « Réponse dans huit jours. » Après quoi les deux pères se quittèrent, avec de grandes marques d’estime et de cordialité.

André Léo.

(À suivre.)