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semaine à faire des plans qui, de la modeste somme du point de départ, s’élevèrent à des chiffres superbes. Nous entendîmes bêler plus de vaches que n’en rêva Perrette ; nous vîmes onduler plus de moissons qu’on n’en attribua jamais au marquis de Carabas. Tout cela pour Grazia. C’était devant elle que nos épis s’inclinaient ; autour d’elle que bondissaient nos troupeaux ; c’était sous sa main blanche que coulaient délicieux les flots de lait ; c’était sa présence qui rendait le travail attrayant et la richesse poétique.


III

Il fallait bien rêver d’elle, car désormais les jours passaient sans la voir, et moi, qui n’étais pas amoureux, le sourire de cette aimable fille me manquait aussi ; je l’aimais en frère. Plusieurs fois, nous rencontrâmes de Ribas ; mais cela n’eut d’autre résultat que des conversations au café, et mes questions sur les autres membres de la famille n’obtinrent pas l’invitation de les aller voir. Ce brave don Antonio restait imperturbable dans une fatuité de croire qu’il représentait pour nous tous les siens, et que nous n’aimions que lui.

Pour voir Grazia, nous fûmes obligés d’aller à l’église, où, de loin, le coloris de ses joues et le timide éclat de ses yeux, nous parlèrent ; mais ce fut tout ; il n’y avait point de bal ce dimanche, et nous perdions patience, quand vint Quirico, chargé de nous avertir que le Graminatorgiù avait lieu le surlendemain.

Il va sans dire que nous arrivâmes des premiers. Deux ou trois Jeunes filles, ou jeunes femmes, seulement se trouvaient là, aidant les dames de Ribas à faire les apprêts. C’était dans la cour que l’épluchage de la laine devait avoir lieu ; elle fut apportée sur des draps. Les femmes, à mesure qu’elles arrivaient, s’asseyaient autour ; ce fut bientôt une corbeille complète, et des plus gracieuses, car on n’y voyait que frais visa-