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ter pour lui, de peur qu’on le sût ; moi, le marchand sans doute m’eût refusée, car tout le monde savait ce que nous en voulions faire. J’allai de la part de Fedele trouver Pietro, et il me donna avec empressement tout ce qu’il avait, disant : — Ce pauvre Nieddu ! Il faut bien qu’il tue quelque daim pour sa nourriture ! Mais je voyais dans ses yeux comme la danse d’une flamme de feu, pareille à ce que peut être le rire de Satan. Et de ce moment je le haïs et le méprisai, car je me dis : — Celui-ci tue son ennemi en lui serrant la main.

— Et maintenant, signor, cet homme veut tuer Nieddu pour épouser Grazia, et elle, qui en aime un autre, accepte ce traitre pour vengeur et feint de nous haïr, quand la mort de son époux l’a délivrée de sa chaine. Tout cela est-il juste et franc ? Ah ! si elle avait su résister à son père et épouser don Effisio, qui, lui, ne veut pas tuer ceux qu’il ne hait pas, je l’aurais aimée, votre Grazia. Mais…

Ils devaient bientôt revenir de la fontaine ; afin d’éviter une nouvelle rencontre, j’emmenai Raimonda par un sentier plus abrupt que le chemin et qui remontait aussi la colline. Je comprenais son but maintenant : la pauvre fille, inquiète pour la vie de son amant, était au fond l’alliée des amours de Grazia et d’Effisio. Tout en marchant, elle continuait de répandre son cœur.

— Il faut que vous disiez cette chose à don Antonio et à Grazia, n’est-ce pas ? Si aveuglé que soit le père, et si faible qu’elle soit, elle, ils ne peuvent pourtant passer outre à un tel soupçon. Ils ne m’auraient pas crue, moi, ils n’auraient pas même voulu m’entendre. C’est pourquoi je vous ai cherché, Oh ! maintenant que ce Murgia est le fiancé, je n’ai plus une minute de vrai bonheur ! Je suis comme la perdrix qui voit o milan planer sur ses petits, éparpillés autour d’elle, Quand Fedele sort de la maison et que je ne puis le suivre, mon cœur demeure serré