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ment ; à Sassari, j’ai vu des contredanses et des polkas. Oui, c’est plus joli, plus doux ; pourtant, j’aime notre danse, parce que c’est la nôtre.

— Effisio ne l’a pas oubliée.

— Je ne sais pas, dit-elle d’un air air boudeur, qu’elle voulait rendre indifférent, et sans paraitre voir le coupable.

— Ce Tolugheddu est bien gênant ! dit-il en soupirant.

— Pourquoi cela ? demanda-t-elle, comme pour prouver que la plus douce et la plus naïve des filles a ses hypocrisies coquettes. Je me mis à rire, et lui demandai comment elle trouvait le jeune Oliénais.

Elle se garda de manquer l’occasion et affirma qu’il était fort bien. Pauvre Grazia ! en ce moment-là, ce garçon ne l’inquiétait guère. Et pourtant Effisio se donna la peine d’être indigné. — Les amoureux sont bêtes et charmants en tous pays.

Au bout d’un quart d’heure, la danse recommença, et cette fois Effisio fut le plus prompt à saisir la main de sa cousine. Cette danse peut irriter les sens, mais elle ne favorise pas les entretiens. Cependant, il faut veiller à ne tenir que le bout des doigts de sa danseuse ; aller plus loin, paume contre paume, serait une inconvenance bientôt punie par le père ou par le frère, à moins que les jeunes gens ne soient fiancés. On me pressa de me mêler à la danse, mais je dus m’en retirer ; car ce trépignement, tout sauvage qu’il soit, est un pas, et doit être appris, pour qu’on puisse s’accorder avec les autres.

Après le bal, il y eut banquet chez de Ribas ; une profusion de viandes couvrait la table, au milieu desquelles figuraient pompeusement le rôti de daim et la hure de sanglier. Tout le monde ne pouvant trouver place, les plus considérables seuls étaient assis, dont j’étais, il va sans dire ; les autres allaient, venaient, entraient ou sortaient, et se servaient à leur convenance. Le vin coulait