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le point où secrètement sans doute il souffrait et se sentait coupable ; mais il prit de nouveau le ton haut pour me répondre, qu’il connaissait ses devoirs et n’avait pas besoin de conseils.

— Alors, je n’ai plus qu’à vous demander pardon de ma bévue, et de vous avoir causé ce trouble inutile. Au revoir, mon hôte !

Je lui tendis la main, ne voulant à aucun prix me brouiller avec lui, et m’ôter l’espoir, quelque vague qu’il fût, de revoir Grazia et de pouvoir lui être utile. Don Antonio, je crois, eût préféré se fâcher ; mais, il accepta ma main, d’un air de mauvaise humeur, et nous nous quittâmes.


XXI

Désormais, tout dépendait de la résolution de Grazia. Mais ce fut vainement que nous allâmes chaque nuit interroger notre poste secrète : aucun billet ne s’y trouvait. La gardait-on à vue ? Aurait-elle cédé aux objurgations de son aïeule, de son père ? Aucun bruit extérieur ne venait à nous, et nous ne pouvions que conjecturer.

Dans les termes où j’avais quitté don Antonio, c’eût été de ma part une inconvenance que de me présenter dans la maison, à moins d’un motif très-plausible. Nous restâmes donc à nous dévorer dans l’attente.

Si nous avions été moins absorbés, plus attentifs aux bruits du dehors, nous aurions su la cause du silence de Grazia.

Ce fut le seul désir de m’instruire des choses du pays qui me fit demander à Angela ce qu’était cette fête de la neuvaine, dont j’entendais parler à Nuoro.

C’est dimanche prochain, après-demain, dit-elle. Est-ce que Leurs Seigneuries n’y vont pas ? Quoi ! don Antonio ne vous a pas invités ?

— Non, dis je.

— Est-il possible ! s’écria-t-elle. Oh ! alors !…

Je l’interrompis pour lui demander où se tenait cette fête, et pourquoi don Antonio faisait des invitations ?