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prise. Il entra piteusement dans la ronde, côté de Raimonda, sur laquelle mon attention par là fut attirée. Décidément, les sentiments de cette jeune fille étaient violemment excités. Son visage exprimait à la fois la douleur et la colère, et ses yeux, brillants d’un éclat extraordinaire, revenaient sans cesse s’attacher sur Antioco et Grazia. Était-elle jalouse ?

Mais bientôt je la perdis de vue dans le mouvement général. La ronde, quelque temps encore lente et oscillante, s’anima ; les trépignements devinrent plus forts, plus marqués ; ils produisaient sur la terre un rhythme sourd, qui de plus en plus animait les danseurs ; les bras s’étendirent, le cercle s’élargit ; alors, une partie de la chaîne se précipita sur l’autre, revint, riposta. Une autre partie à son tour, se précipita dans un autre sens, et tous ces plis humains s’enroulèrent, se déroulèrent, en se ruant les uns sur les autres, avec un entrain sauvage, aux trépidations monotones et précipitées de la launedda, que les assistants aidaient de la voix. Et plus le mouvement s’accroissait, plus la danse devenait furieuse, haletante, et prenait le caractère d’un assaut, plutôt que d’un exercice joyeux. Enfin, la launedda se tut ; le zampognatore, ou sonneur, se jeta dans un coin, à demi mort, ruisselant de bave et de sueur ; la ronde excitée, galopa quelque temps encore, telle qu’un cheval emporté par son élan au delà du but ; puis, les rangs se rompirent, les danseuses, au visage écarlate, s’éparpillèrent dans tous les coins, et les hommes, non moins échauffés, mais voulant paraître plus fermes, restèrent debout, et se formèrent en groupe au milieu de la cour.

Je m’étais approché de Grazia ; Effisio vint nous rejoindre :

— Comment trouvez-vous notre danse ? me disait-elle.

Étrange, tout à fait !

— Oh ! je sais comment on danse, autre-