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Il ouvrait de grands yeux et ne comprenait pas.

— Qui donc ?

Je repris :

— Il y a longtemps que je soupçonnais cet homme et que faute de preuves je n’osais rien vous dire. Mais j’ai ces preuves aujourd’hui et je veux vous les communiquer.

— Eh bien ! me dit-il, d’une voix un peu altérée, faites ! De qui parlez-vous !

— De Pietro de Murgia.

— Ce n’est pas vrai ! cria-t-il avec colère. Ah ! voilà donc le but de la promenade J’en étais sûr. Eh bien vous avez eu tort de vous déranger. Tout ça ne prend pas sur moi, voyez-vous. J’ai donné toutes les chances à Effisio ; il ne les a pas voulues ; tant pis pour lui ! Qu’il me laisse tranquille maintenant et s’en aille vivre sur le continent, avec ses amis ! Nous sommes Sardes, nous autres ! Nous ne laissons pas toucher à nos traditions d’honneur ! Ma fille est ma fille, et je n’accepte pas de raisons ; je fais ce que je veux !… On ne me mène pas, monsieur le Français ! on n’en fait pas accroire à don Antonio de Ribas ? Laissez-moi toutes ces manigances ! Je suis bon et généreux ; mais il ne faut pas me serrer de trop près ; car j’ai dans les veines du sang d’hidalgo en même temps que de Sarde. Vous avez été mon hôte ; je ne veux pas me brouiller avec vous ; mais je ne souffre pas qu’on touche à mes amis. Tenez-vous-le pour dit.

Je me tiens pour dit que vous ne voulez pas connaître un fait qui vous concerne, lui répondis-je froidement. Soit ! Que je sois ou non l’ami d’Effisio, là n’est pas la question. Il s’agissait de faits dont je vous devais comme ami la confidence, parce qu’ils vous importent extrêmement. Vous ne voulez pas savoir ; c’est votre faute. Moi, j’ai fait mon devoir. N’en parlons plus !

Il me regarda, les yeux tout troublés encore de colère et respira fortement. La première fougue s’était épanchée.

— Je ne laisse jamais calomnier mes amis, dit-il.