vre enfant, et je lui vis une joie de ce tête à tête qui me causa un remords. Elle me précéda en courant sur la plate-forme et m’obligea par ses imprudences de la gronder, de la retenir par la main, de m’occuper d’elle enfin plus intimement que je n’eusse voulu.
— Comme cela est beau de regarder de si haut ! me disait-elle en jetant dans mes yeux ses beaux grands yeux, pleins de l’enchantement qu’elle éprouvait, et d’une autre flamme encore ; je voudrais rester là jusqu’à ce soir !
— Est-ce la première fois que tu y viens ? demandai-je, un peu embarrassé, pour dire quelque chose.
— Oui. Tu sais bien que nous ne sortons jamais pour nous promener, comme vous autres, mais pour faire quelque chose, comme aujourd’hui rapporter de l’herbe. Et moi, j’aimerais tant à me promener, ainsi que toi, pour la nature et la poésie ! Oh ! que je suis heureuse d’avoir voulu grimper à ce Nur-Hag et d’avoir décidé ma sœur ! Quelque chose m’a parlé dans le cœur, va !
— Ou plutôt, lui dis-je, voulant éclaircir un soupçon, tu nous as reconnus, Effisio et moi, du pré où vous étiez, quand nous montions la colline.
Elle devint rouge, comme un coquelicot.
— Non ! non !
— Si, dis-je avec instance, en la regardant de près ; ne mens pas, Effisedda !
Tu ne l’as pas dit à ta sœur ; mais c’est pour cela que tu es venue. Et pourquoi le cacher ? Je t’en sais gré.
La petite fille, ou plutôt la jeune fille, — elle avait près de quinze ans, de plus en plus rouge et confuse, baissa la tête, voulut nier encore, et tout à coup se jeta dans mes bras en pleurant :
— Méchant ! Méchant ! disait-elle.
Je fis cesser la dangereuse étreinte’, en l’embrassant au front, et la faisant asseoir près de moi, sur le gazon brûlé qui garnissait la plate-forme.
— Ne pleure pas, je ne puis t’en vouloir. Seulement, il ne fallait pas dire…