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avec la vie lui semblait une solution aussi enviable que toute autre.

Preddu Floris regardait, écoutait, souriait parfois d’un mauvais rire, et là se bornait son rôle. Il m’aida seulement à écarter les pierres qui parsemaient le champ de bataille, à l’exception d’une que nous ne pûmes soulever, mais qui se trouvait un peu à l’écart. Le combat commença.

Je vis dès les premières passes que Pietro de Murgia ne connaissait pas l’escrime ; il parait mal, mais attaquait d’une façon d’autant plus redoutable qu’il était difficile de prévoir ses coups. Pendant longtemps, la chance fut égale ; et je voyais le Sarde témoin de ce combat, tout nouveau pour lui, regarder d’un air émerveillé, l’éclair des lames et ces coups de mort, sans cesse écartés et suspendus. Mais bientôt l’avantage de Murgia se fit sentir. Sa haute taille et sa longue lame serrèrent et menacèrent de plus près son adversaire. Effisio dut plusieurs fois s’effacer et rompre. Toutefois, un de ses coups porta juste ; la manche de velours bleu de Murgia fut entamée et le sang rougit la chemise. Je voulus faire cesser le combat.

— Ce n’est rien ! cria de Murgia.

En même temps, attaquant de côté, d’un mouvement terrible, il força Effisio à reculer, en changeant de direction. Dans ce mouvement, il rencontra sous ses talons la pierre que nous avions dù renoncer à écarter, à cause de sa masse, et il chancela. De Murgia en profita pour donner un coup de revers, qui ne parvint pas à faire sauter la dague des mains d’Effisio, mais détermina sa chute en arrière. Prompt comme un fauve, Pietro de Murgia fut sur la poitrine de mon malheureux ami et lui mit sa dague à la gorge.

— Arrêtez ! m’écriai-je en courant. C’est un assassinat !

— C’est une victoire ! me répondit Pietro de Murgia, en se relevant, l’œil éclatant, la bouche tordue par un rictus triomphant et sauvage.