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Mais elle restait quelque peu en dehors de l’ombre, la tête en pleine lumière. Je me tins debout près d’eux, surveillant les alentours.

— Je t’aime passionnément ! telle que tu es ; je t’aime avec une force nouvelle dans les angoisses de cette terrible douleur, craignant de te perdre… et t’ayant déjà presque perdue ! Je te donnerais ma vie avec joie ! — Mais ce que tu me demandes, Grazia, c’est la vie morale de mon être, l’étincelle sacrée, sans laquelle je ne serais plus un homme. Alors, que ferais-tu de moi ?… Et qu’en ferais-je moi-même ?…

— Je ne te comprends pas, lui dit-elle ; ce que nous voulons, nous autres, est-il donc si vil ? On te demande ce qu’auraient dû faire les juges, ce qu’ils font souvent, et que tout le monde respecte. Punir un coupable, cela ne s’appelle-t-il pas justice ? Eh bien ! alors, être juste, comment cela pourrait-il te dégrader ? Tu as des idées étranges, et tu leur. sacrifies notre bonheur. Et tu prétends m’aimer ? Non ! je ne te crois pas !

— Grazia ! Grazia !…

Non ! je ne crois pas que tu m’aimes ! Pietro de Murgia m’aime, lui, et fait ce qu’ils faut pour m’obtenir. Pourquoi ne puis-je l’aimer ? Pourquoi t’ai-je aimé, toi, dont l’âme froide ne s’attache qu’aux choses de l’esprit, qu’aux idées du monde étranger ?

— Ô Grazia !… Il me manquait donc une torture, puisque je t’entends parler ainsi !

— Qu’y puis-je, moi ? Je dis les choses comme elles sont… Est-ce aimer que de ne rien sacrifier à celle qu’on aime ? Que pourrais-tu me demander, à moi, que je ne t’accordasse avec joie, avec transport !

Il était trop facile de lui répondre :

— Grazia, dit Effisio en la rapprochant de lui, Grazia, je t’ai demandé, je te supplie encore aujourd’hui de renoncer à la vengeance. Et tu me refuses !

— C’est que tu me demandes la seule chose que je ne puisse l’accorder. Tu me de-