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FEUILLETON DU SIÈCLE. — 28 MAI 1878.

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GRAZIA

RÉCIT D’UN VOYAGEUR
RECUEILLI PAR
ANDRÉ LÉO

DEUXIÈME PARTIE.
XIII. — (Suite.)

Effisio accueillit cette idée et me promit de l’exécuter, pour une part ; mais, se défiant de lui-même pour une exposition théorique, surtout dans l’état de trouble où il était, il me pria de me charger moi-même Je pensais bien que mes lettres seraient à peine lues, tandis qu’on relirait vingt fois celles d’Effisio ; cependant, comme Grazia était sincère et pleine d’amitié pour moi, j’espérai ne pas faire une couvre inutile.

Chaque jour donc, nous écrivions l’un et l’autre de longues lettres, qu’Effisio portait chaque nuit dans le creux du mur. Sans heurter les préjugés religieux de Grazia, ce qui l’eût de suite mise en garde, je me plaçai uniquement sur le terrain du sentiment et de la conscience ; et prenant pour exemple le vœu d’un roi nègre, qui promet, s’il guérit d’une maladie, de faire trancher la tête à maille hommes de sa tribu, je lui demandai si elle jugeait que le roi fit tenu d’exécuter ce vœu, dans le cas où moi, son conseiller, je parviendrais à lui en prouver l’inhumanité.

Elle me répondit — je m’y attendais — que ce vœu, monstrueux et abominable comme l’idolâtrie qui l’avait inspiré, n’avait été fait qu’à un faux dieu Je m’attachai à démontrer, dans la lettre suivante, que la divinité, fausse ou vraie, objet du vœu, n’était pour rien dans l’affaire, puisqu’elle ne se manifestait pas. Supposant qu’elle accep-