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poir, seule consolation qui leur restât. Dès qu’ils entrèrent dans cette voie, je les quittai, sous un prétexte, les laissant goûter ces tristes douceurs.

L’amour seul pouvait les sauver ! Ferait-il ce coup de génie ? Mais les dieux ont fait leur temps, et, même sur cette terre de Sardaigne, où florit encore le moyen-âge, il y a des incrédules. C’était Grazia qu’il fallait éclairer, c’était à la déesse Raison qu’il fallait avoir recours. Je ne voyais pas autre chose.

Il était plus de deux heures. Et sans vouloir prêter une oreille indiscrète, je n’entendais sortir de l’ombre de la roche que sanglots, baisers, murmures amoureux. Pour les sauver, je devais être cruel ; je m’avançai bruyamment.

— Encore une demi-heure, leur dis-je, et de Ribas se lèvera pour aller aux champs, ou à la chasse ; dépêchons-nous !

La jeune femme rajusta sa benda un peu dérangée ; ils échangèrent de longs serrements de main ; puis elle prit mon bras, pour échapper aux étreintes d’Effisio, qui la retenait encore, et je l’entrainai rapidement. Avant de me quitter, d’une voix basse, un peu confuse, et toute amicale :

— Faites-moi une promesse !…

— Tout ce que vous voudrez.

— Une autre fois, ne nous quittez plus !

— Ah ! dis-je, un peu fâché, vous avez surpris ma bonne foi, Grazia. Je suis aussi l’ami d’Effisio. Eh ! je lui parlerai, si vous vous voulez d’honneur, de prudence ; mais laissez-vous goûter l’an et l’autre le peu de bonheur que vous pouvez avoir.

— Non, non ! répéta-t-elle, non ! je vous en prie ! vous m’avez promis !…

Elle se tut avec souffrance, puis, sous la lumière pâle des étoiles, je voyais son visage plus coloré.

— Je crois toujours être forte quand il n’est pas là ; mais, avec lui, je ne le suis plus. Et cela me rend très-malheureuse. Je vous en prie, mon ami, tenez votre promesse.

Il fallut bien la lui confirmer ; alors, elle