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est toujours dominée par ses parents, et de plus, cette fois, par un devoir qu’elle accepte et un serment qu’elle a fait ; l’obstacle n’est plus seulement extérieur à elle, il est en elle-même. Et cela constitue une situation encore plus contraire, encore plus forte contre moi que la première.

— Mais elle t’aime, et cette douce et bonne créature ne peut avoir dans l’âme aucune férocité. Nous lui ferons entendre le langage de la vraie vertu, de la vraie justice, et, j’en suis sûr, elle nous comprendra.

Nous laissâmes passer les vingt-quatre heures d’irritation accordées aux vaincus des cours de justice, avant de nous présenter chez de Ribas. Mais ce dicton, s’il s’accommode à nos natures, parfois un peu rétives, mais soumises au frein de la raison et des lois, n’a rien à voir avec la nature des Sardes. Rien n’était changé dans l’exaltation des deux familles ; seulement, les Tolugheddu s’apprêtaient à rentrer à Oliena, après un séjour de près de deux semaines chez les Ribas. Don Antonio nous reçut mal.

— Tu étais malade, hier, n’est-ce pas ? dit-il à Effisio d’un air méprisant, et c’est pour cela qu’on ne t’a pas vu ?

— Non, répondit mon ami, non, don Antonio, je n’étais pas malade ; c’est que je n’ai pas voulu venir.

— Bon ! c’est mieux. Et maintenant as-tu fait ton choix ?

— Pas encore.

— Ne te gêne pas ! prends toute la vie s’il faut. Chacun va du pas dont il marche. Il y en a de lents et de pressés.

Nous assistâmes aux adieux des Tolugheddu. Le vieillard, toujours prudent, se tut devant nous ; mais sa femme, toute à la passion de sa douleur, depuis que la mort de son fils l’avait arrachée à sa somnolence de ménagère paisible et occupée, serra Grazia contre son cœur.

— Adieu, ma fille ! Au revoir, épouse de notre Antioco ! Pourquoi nous as-tu quittés ? Car tu es et tu seras toujours notre fille, puisque tu dois choisir le vengeur… Et calvi-