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qu’il était bien étrange que le sindaco Lortu qui avait trouvé le sommeil si bon cette nuit-là, vint lui apprendre comment les choses s’étaient passées. De tous côtés, arrivait la population et c’étaient, particulièrement autour du cadavre mutilé, des cris, des exclamations, des suppositions interminables.

— Et qui sait, monsieur, s’il n’est pas de X… même, aclui-là ? me dit Cabizudu ; la précaution le ferait croire.

J’eusse voulu partir ; mais le curé se récria si fort que je dus attendre le repas, qui devait avoir lieu à dix heures. À deux heures seulement de l’après-midi, nous nous mettions à table. Je reçus alors une nouvelle visite du sindaco, me priant de vouloir bien me charger de son message pour le sous préfet de Nuoro. Et ce message n’était pas prêt ; et sans doute le sindaco Lortu n’avait pas la rédaction facile ; car ce ne fût que deux heures a près qu’il me le remit. Il n’était guère moins de cinq heures et demie quand enfin l’impatient Cabizudu put amener nos chevaux et quand nous partîmes, après avoir reçu l’un et l’autre les remerciements de don Gaetano.

L’éloquence de mon écuyer n’avait pas été tout à fait perdue ; il emportait un billet de 20 fr., lâché par l’avare curé.

— Eh ! combien lui en avons-nous sauvés de billets de 20 fr. et même de mille ! me disait Cabizudu, avec des yeux pétillants de convoitise ! Il aurait bien pu m’en donner cinq fois autant sans qu’il y parût. Tout de même, je suis content de ce que m’a rapporté mon coup de fusil. Mais n’oubliez pas, signor, qu’il n’en faut rien dire !

Je le laissai bavarder tout seul, préoccupé que j’étais de rassembler, avec toute la précision possible, mes souvenirs, et d’examiner une supposition, qui me semblait de plus en plus probable, à mesure que je groupais autour des faits récents les faits éloignés. Ce chef de bandits, grand, bien découplé, qui excitait les autres à l’attaque, avait toutes les allures de Pietro de Murgia. Sa voix,