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n’est ni timide, ni raisonneur ; bien qu’il ne manque pas d’esprit et d’habileté. Si je suis venu te parler comme je l’ai fait, c’est que Grazia est une sotte, et que je veux pourtant être bon père. À présent, réfléchis, et à ton aise !

Effisio, au désespoir, m’avait écrit tout cela. Ainsi donc la situation redevenait la même sous une autre forme ! Qu’allait-il devenir ? Que devait-il faire ? Descendre au rôle d’assassin ? Non ! il ne le pouvait pas, ne le voulait pas ! Pour conquérir Grazia, on lui imposait de rompre avec sa conscience ! Et pourrait-il alors être heureux ? Mais qu’importe le bonheur ? on lui demandait bien plus ! C’était un faux serment, ou un crime ! le déshonneur vis-à-vis de lui-même, peut-être vis-à-vis des autres, la ruine de sa vie ! Il me demandait conseil, tout en s’écriant qu’une telle situation était inextricable, qu’il se sentait voué au malheur, et n’entrevoyait plus qu’un avenir fatal. Sa lettre se terminait par des imprécations contre les mœurs et les préjugés sauvages de son pays, où il eût regretté d’être né, si ce n’est qu’il n’eût point voulu ne pas connaître Grazia, la douleur et le charme de sa vie ! — Trois pages de désespoir et d’amour.

J’étais sur le point de quitter Rome. Il me prit un grand désir de les aller voir. Et comme j’hésitais encore, une assignation me parvint à comparaître devant la cour d’assises de Nuoro, en qualité de témoin à charge, dans le procès Fedele Nieddu, accusé de deux meurtres : l’un sur la personne de Giuseppe Colzu, dit Pepeddo, le 25 juillet 187., l’autre sur la personne d’Antioco Tolugheddu, le 27 octobre de la même année. — Bientôt après, je reçus un billet d’Effisio à ce sujet. Il se réjouissait de me revoir et me disait :

« … Dans ce procès, notre sort va être décidé. Je pensais l’attendre longtemps ; mais par un concours extraordinaire d’ajournements des autres affaires qui précédaient celle-ci, et qui devaient occuper toute la session, le procès Nieddu viendra dans le