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jusqu’à l’absurde ? J’entends encore le serment qu’elle fit sur ce cercueil !… Sans la capture de Nieddu, que de peines ce serment nous eût causées ! Ah ! que n’es-tu là, mon ami, pour la raisonner et la convaincre !… »

J’engageai Effisio à respecter les convenances qui ordonnent le deuil aux veuves dans tous les pays, et j’écrivis à Grazia en lui disant que les sentiments vrais, lorqu’ils sont honnêtes, ont des droits supérieurs à toute loi de convention. Elle me répondit une lettre courte, mais gentille, où elle me disait : « Je sais bien pourquoi vous m’avez parlé ainsi. Je crois comme vous que ce qu’il y a de meilleur, et ce qu’il faut le plus chérir, ce sont les grandes affections qui se sont emparées de notre cœur ; mais il y a d’autres idées que les nôtres, et d’autres personnes que nous. Pour moi, je l’avoue, cela m’attriste beaucoup de fâcher les gens, et surtout mes parent ; mais aussi, voyez-vous, il y va de notre intérêt ; il n’est pas prudent de mettre contre nous ceux qui peuvent nous causer des peines… — Je voudrais voir Rome ! c’est un de vos grands pays, n’est-ce pas, où le cœur a sa liberté ?… Que je voudrais qu’il en fût ainsi dans ma pauvre patrie ! que j’aime pourtant bien, malgré tant de douleurs qu’elle m’a causées…

L’hiver se passa et les lettres d’Effisio continuèrent de me retracer les phases, peu marquées, de la situation indécise où il se trouvait. Grazia toutefois, malgré ses scrupules, devenait de plus en plus tendre.

André Léo.

(À suivre.)