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dire, à tout moment, des choses… des riens si tu veux ; mais qui me remplissent le cœur. L’amour n’est vraiment pas complet sans l’amitié. Hélas ! il est bien incomplet jusqu’ici pour moi ! N’ayant pas les droits d’un fiancé, je dois inventer mille prétextes pour voir Grazia. Tu penses bien que j’en trouve toujours ; mais je suis fort inquiet : don Francesca — depuis qu’il fait plus froid, don Antonio chasse plus que jamais — ne s’apercevra-t-elle pas de la fréquence de mes visites et n’en avertira-t-elle pas son mari ? Il est vrai que cette excellente femme ne s’occupe de rien autre que de son ménage ; mais l’aïeule ! Cette terrible Effisia ! quand elle ne sommeille pas, je vois souvent attaché sur moi le regard clair et perçant de son œil cave…… il me fait trembler.

» Ta chère lettre, chère par elle-même, m’a causé de plus la joie d’avoir à porter de tes nouvelles et tes compliments chez les Ribas. Pour comble de bonheur, Grazia n’était pas à son métier, c’est-à-dire sous l’œil de l’Effisia ; mais toute seule à la cuisine, où elle triait la farine. Au premier coup d’œil, cela m’a causé un saisissement de la voir !… Elle n’avait que sa chemisette blanche et un jupon blanc, et sur la tête une petite calotte blanche, qui retenait à peine ses cheveux ; car elle a de très-beaux cheveux, ma Grazia ; tu ne le sais peut-être pas, à cause de cette fâcheuse habitude qu’elles ont de se couvrir la tête. — De beaux cheveux bruns d’une finesse extrême et que je mourrais d’envie de voir dépliés sur ses épaules. Ainsi vêtue, j’ai cru la retrouver jeune fille ; il me semblait avoir encore sous les yeux ma chère et délicieuse Grazia d’autrefois… je me suis arrêté sur le seuil ; elle est devenue toute rouge.

» — Ah ! me dit-elle, Effisio, vous ne demandez point si l’on peut vous recevoir ? Vous me surprenez dans une toilette…

» — Qui me plaît à un point que je ne saurais dire, ai-je répondu.

Elle a haussé les épaules doucement. Je