Nous sortîmes, et j’allai roder autour de s la prison. Au bout de la ruelle qui fait face à l’entrée, dans un coin, je vis une femme accroupie, les mains autour de ses genoux, les yeux attachés sur le grand et triste bâtiment. C’était Raimonda ; je m’approchai d’elle :
— Que faites-vous là, Raimonda ? Vous ne pouvez rien pour lui ; il faut rentrer chez votre mère.
Elle s’était tournée vers moi, avidement, comme si elle espérait quelque secours de moi.
— On ne veut pas me mettre en prison avec lui, dit-elle, pourquoi ? S’il est coupable, je le suis plus que lui ; c’est moi qui lui ai donné cette vendetta ; c’est pour moi qu’il a tout fait.
Tant d’inconscience et de folle passion m’irritèrent.
— C’est ainsi que vous parlez ! m’écriai-je. Après l’avoir poussé au meurtre, vous le perdez maintenant par vos aveux, et lui ôtez même la possibilité de se défendre ! Ah ! funeste créature ! quel malheur a-t-il eu de vous aimer !
Elle se leva toute droite, ouvrant de grands yeux, comme si elle se réveillait.
— Qu’ai-je dit ? qu’ai-je dit ? Moi le perdre ! Moi qui donnerais ma vie pour lui avec tant de joie ! Qu’ai-je dit ?
— Je lui répétai ses propres paroles ; ses yeux brillèrent.
— Eh bien ! dit-elle, je n’ai accusé que moi. Qui, je lui ai dit de me venger ; mais tout ce qu’il a fait, ç’a été de menacer Antioco. Ce n’est pas lui qui l’a tué !
(À suivre.)