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Murgia le captivait par la flatterie et de grands airs de déférence et de dévouement. Cela était assez menaçant pour Effisio ; toutefois, la grande question de la vendetta écartée, il eût fallu que don Antonio s’obstinât singulièrement dans le rôle de père barbare, pour sacrifier une seconde fois les inclinations de sa fille, qui d’ailleurs atteindrait sa majorité, à l’époque où la loi lui permettrait de nouvelles noces. Il me parut donc que rien de sérieux ne les menaçait, et je me préparai au départ, en promettant à Effisio de revenir à Nuoro pour son mariage.

Je devais une visite d’adieu au curé de X…, qui m’avait si généreusement ouvert sa bibliothèque. Nous y allâmes, Effisio et moi. Pour le coup, il fallut faire des visites chez les notables et boire une énorme quantité de verres de vin et de tasses de café. On nous conduisit entre autres chez le plus gros propriétaire du pays, riche, nous dit-on, de plusieurs centaines de mille francs, c’est-à-dire possédant des montagnes entières, avec la plaine. Il avait fait élever sa fille à Milan, et c’était une jeune personne accomplie, faite absolument sur le modèle de la ville, musicienne, dessinatrice, brodeuse émérite, etc. Nous fûmes invités à dîner pour trois heures et nous y étions encore le soir. On fit de la musique, on dansa même, à l’approbation du vicario, qui était des nôtres ; enfin nous nous retirâmes vers dix heures. Le maître de la maison vint nous éclairer jusqu’à la porte de l’appartement. Elle était ornée d’un judas, et non-seulement fermée à clef, mais verrouillée, de plus assujettie par des barres de fer. Il fallut attendre que deux serviteurs eussent levé toutes ces barrières pour passer dans la cour. Alors, notre hôte nous souhaita le bonsoir, et nous l’entendîmes de l’autre côté pousser les verrous, mettre les barres, et tourner les clefs grinçantes.

— Quel luxe de précautions ! pensai-je.

On nous ouvrit ensuite la porte de sortie, avec les mêmes difficultés, Celle-ci était re-