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ses dont tel ou tel venait l’entretenir. Nous montâmes chaque jour à cheval. — Un fait que j’ai constaté dans le Midi, un peu partout, même chez des gens très-intelligents, c’est l’absence de goût pour la lecture et l’étude, — j’aurais presque dit le dégoût. — Quant à écrire, c’est différent ; on se fait journaliste et littérateur, sans pour cela ouvrir un livre. — La chose se voit ailleurs qu’en Italie, après tout.

Nous étions retournés à Oliéna le surlendemain pour assister aux funérailles d’Antioco. Elles eurent lieu dans un morne silence. Nulle parole de vengeance ne fut prononcée en public. Mais, avant le départ dans la maison, il y avait eu de nouveaux cris de haine contre le meurtrier, Pietro de Murgia s’y était distingué par une violence théâtrale. Le jour du meurtre, averti trop tard, il ne se trouvait point à l’Attito ; mais, aux funérailles, ils furent, lui et l’Effisia, les prêtres du culte de la vengeance. Après avoir fait un éloge emphatique du mort, qu’il avait si souvent raillé pendant sa vie, Pietro de Murgia posa sa dague sur le cercueil.

— Je te l’apporte pour qu’elle soit bénie ! dit-il.

Puis, il s’était jeté dans les bras de don Antonio, fort attendri, et dans ceux des Tolugheddu. Après les funérailles, un banquet fut servi aux assistants. Nous revînmes en compagnie de Pietro de Murgia et de don Antonio. Celui-ci nous dit qu’il reprendrait. sa fille chez lui, après quelques jours accordés à la douleur des Tolugheddu.

— Je sais, nous dit-il, qu’elle serait malheureuse avec le vieux ladre ; à présent que le pauvre Antioco n’est plus, la maison va devenir plus triste qu’un tombeau. Ma fille n’est point à eux maintenant, à moins qu’elle ne soit enceinte. Mais ils lui ont déjà reproché devant moi de ne pas s’être hâtée d’avoir un fils d’Antioco. Ah !… ce qui est fait est fait ; mais, si c’était à refaire… si j’avais su avant les fiançailles, qu’Antioco avait une vendetta sur lui… Voilà ma pauvre Grazia