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toute nécessité rompre avec le milieu, passer à des horizons nouveaux.

J’entrai un jour dans la chambre d’Angela. Elle avalait une minestra, d’un air qui n’excluait nullement l’appétit. Cependant, se recouchant sur ses oreillers avec un long soupir, elle me dit encore, en réponse à ma question : comment allez-vous ?

— Eh mon cher signor, la vieillesse est un mal qui ne guérit point.

— Mais qui dure longtemps, répliquai-je. Eh bien ! Angela, il le faut, laissez-nous partir. Nous reviendrons vous soigner, dans un an ou deux, plus tôt peut-être ; mais pour le moment nous avons affaire ailleurs qu’ici, et dans l’intérêt d’Effisio il faut qu’il parte.

— Eh mon bon signor ! me dit-elle tout effrayée, comme vous y allez ! Vous voulez donc me faire mourir sans lui ?

— Vous n’êtes nullement en train de mourir, Angela, mais de guérir. Le médecin l’affirme ; je le vois parfaitement, et à quoi bon le nier ? Quel intérêt avez-vous de retenir ici Effisio ?

— Et vous, répliqua-t-elle, pourquoi voulez-vous l’emmener ? N’est-on pas toujours mieux dans son pays ?

Nous débattîmes là-dessus et, voyant bien qu’elle ne pouvait me convaincre, Angela, d’un air solennel, me dit :

— Eh bien ! sachez toute la vérité. Ce sont mes esprits qui m’ont conseillé de rappeler Effisio.

Je ne pus retenir un geste, fort irrespectueux.

— Oh ! que vous êtes méchant à présent ! C’est comme je vous le dis. Pendant trois nuits, je les entendais autour de moi : — Effisio ! Effisio ! — Et quand je leur ai demandé : — Que lui voulez-vous ? Tous m’ont répondu comme un seul : — Il ne faut pas qu’il parte. J’étais alors bien malade, mon cher signor, et cependant je ne pensais point à le déranger, bien qu’il me fût dur de penser que je partirais de ce monde, peut-être, sans l’avoir revu ; mais alors, com-