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plus poli que tous les autres, et ils n’ont pas de leçons à vous donner !

Il y avait sous ses paroles, assurément, quelque rancune contre Effisio. Il le sentit, rougit jusqu’aux yeux et me dit d’un air piqué :

— Mon cher, je vous félicite.

— Ne vous y trompez pas, répliquai-je, dona Grazia préfère les Sardes aux Français.

— Qu’en savez-vous ? murmura-t-elle.

— Je l’ai deviné.

— Je ne sais ce que vous avez aujourd’hui, vous êtes méchant, vous qui avez été très-bon jusqu’ici.

Elle cachait sa tête dans sa main, toute éperdue. Je pris l’autre main, celle qui tenait encore la navette, et la réunis dans la mienne à celle d’Effisio :

— Faisons la paix, leur dis-je.

Leurs mains frémissaient ; je retirai la mienne. Ils en firent autant ; mais je les vis un moment aussi abasourdis l’un que l’autre.

Le soir même, Effisio partagea notre souper. Il y avait droit, ayant fait porter chez de Ribas toute sa part de chasse, plusieurs kilogrammes de cerf, une hure de sanglier, des côtelettes de daim. De Ribas nous fit boire outre mesure, et nous allâmes nous coucher assez tard. Effisio me conduisit à ma chambre. À peine y étions-nous, qu’il fit, je ne sais comment, tomber l’entretien sur Grazia, m’obligeant par cent questions, plus ou moins détournées, à dire que je la trouvais charmante, bonne, gracieuse, aimable. Lui-même en faisait l’éloge, s’épuisant cependant, par un reste d’hypocrisie, à trouver des correctifs, qui se changeaient bientôt en éloges nouveaux.

— Elle était bien simple, n’est-ce pas ? bien paysanne ? Mais cela valait mieux que les prétentions de certaines poupées, qui n’avaient pas la centième partie de la distinction native qui éclatait dans Grazia ; elle ne savait presque rien, la pauvre enfant, mais c’est qu’on ne lui avait rien appris, et cela n’empêchait pas qu’elle ne fut supérieure aux autres filles en instruction ; car elle