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mais la pauvre Grazia n’avait pas l’amour !

Cette pensée m’assombrissait cruellement le riant cortége ; pourtant, quand il circula dans la vallée, parmi les massifs de lauriers-roses qui remplissent le lit du Cedrino, ce fut un coup d’œil poétique au delà de toute description. Pourquoi, dans cette fête de l’amour, si belle au milieu de la nature, le dieu manquait-il ?

Chez les gens de la noce, éclataient le rire, les chants, les vives paroles ; partout, la joie et la gaîté resplendissaient, comme le soleil, excepté chez les deux héros de la fête ? Morne et pâle, Grazia ressemblait à une condamnée. Antioco eût bien voulu se laisser aller à la joie ; mais tout-à-coup, il tressaillait, plein d’angoisse et portait autour de lui des regards inquiets. C’eût été pour la vengeance un beau jour !…

À l’arrivée, le village d’Oliena se mit en haie pour nous voir passer. Devant la maison des Tolugheddu, une lutte singulière eut lieu, selon l’usage. Antioco, descendu de cheval, prit un des matelas pour le porter dans la maison. Les jeunes gens de la noce, aussitôt, s’emparant des autres matelas, s’opposèrent à son entrée. Le combat fut acharné. Antioco disparut un moment sous les matelas qu’on jetait sur lui. Toutefois, il vint à bout de pénétrer dans la maison avec son fardeau et l’emménagement commença : à l’intérieur, les jeunes filles et les femmes s’occupèrent de tout mettre en ordre, et chaque meuble fut orné par elles de guirlandes de fleurs et de verdure. Bientôt,