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malédiction de Dieu sur le meurtrier. J’avais beaucoup entendu parler de ces scènes sanglantes ; mais c’était la première dont j’étais témoin. Si la mort, quand elle est naturelle, n’inspire aux esprits sérieux que des pensées philosophiques, plus ou moins calmes, plus ou moins tristes, selon le degré d’affection qu’on porte à l’être qui n’est plus, — cette mort violente et soudaine, qui frappe en pleine vie, et qui est non plus l’effet de causes générales, mais le crime d’une volonté sombre et mauvaise, frappe d’épouvante et d’horreur !

Il fallut faire notre déposition, suffire à mille soins, répondre à cent personnes ; les heures s’écoulaient ; il était plus de minuit, et je voyais Effisio, pâle et fébrile, consulter sa montre et s’apprêter à partir, sans plus de souci des interprétations qu’on pourrait donner à son absence, quand la vieille Angela vint à moi. Déjà, elle m’avait dit vingt fois depuis l’accident :

— Vous savez, signor, depuis ce matin j’étais toute ahurie. Je vous ai dit — vous vous rappelez ? — je ne sais pas ce que j’ai ; mais il arrivera quelque chose d’extraordinaire — Ça ne me manque jamais, voyez-vous. Pauvre Pepeddo !

Cette fois, elle se borna à me remettre un billet, que venait, me dit-elle, d’apporter un petit garçon, disant-elle baissa la voix, que c’était-dona Grazia qui lui avait donné cette commission.

— Et il a eu beau dire que le billet est pour moi, signor. Ce n’est pas possible, puisque je ne sais pas lire. Voyez donc ce que c’est.

J’ouvris le billet ; il ne contenait que cette ligne :

— Qu’il ne vienne pas ce soir ! Impossible…

Emmenant Effisio dans sa chambre, je lui communiquai avec ménagement cet avis. Il s’emporta, accusa Grazia d’abandon, de pusillanimité et jura qu’il n’en irait pas moins