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— Non, je viens de la conduire à l’église ; elle y va tous les soirs maintenant, quand il n’y a personne ; elle devient si dévote, depuis qu’elle doit se marier !…

— C’est donc cela qu’on ne la voit plus ?

— Comment ! Est-ce que tu veux qu’elle aille te voir ?

Et elle se mit à rire.

— Eh bien ! qu’y aurait-il de mal ?

— Oh ! rien. Mais ce n’est pas la coutume.

— Je dis cela, parce qu’étant allé chez vous une fois ou deux, je ne l’ai pas vue.

— C’est vrai qu’elle devient sauvage. Elle va souvent dans sa chambre, excepté quand Antioco est à la maison.

— Ah ! Elle veut le voir ?

— Il faut bien, puisqu’il est son fiancé. Mais c’est qu’elle ne veut pas qu’il aille dans sa chambre. Alors elle n’y va plus.

Tandis que je cherchais un prétexte pour me retirer, elle poursuivit en me regardant.

— Tu es fâché qu’elle se marie avec Antioco.

— Moi ! Et pourquoi ?

— Oh ! je le sais bien !… Tu pars déjà ?

— Effisio m’attend.

— Effisio ! c’est vrai qu’il est plus gentil ; moi aussi je l’aimerais mieux, va ! Mais que veux-tu ? il faut bien obéir à ses parents.

Elle poussa un grand soupir, un soupir de femme, et, serrant la main que je lui tendais, elle jeta dans mes yeux un regard brulant, dont elle-même ignorait le sens et qui m’émut malgré moi.

Je marchai rapidement vers l’église ; il y en a beaucoup à Nuoro, comme dans tout le Midi ; et je n’avais pas osé demander d’indication à Effisedda ; mais j’entrai sans hésiter dans la plus proche. Elle était petite et nue, et je n’avais pas fait dix pas que j’aperçus agenouillée dans une chapelle une jeune fille, qu’à sa taille svelte et pure, je reconnus être Grazia. Malheureusement il y avait dans l’église une autre femme agenouillée près du