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sannes. Peut-on s’intéresser à un arbuste qui vient sur tous les chemins ? Je n’en demandai pas davantage et l’essaim repartit, en bourdonnant, et riant encore du Francese.

Peut-être pourrais-je rencontrer Grazia seule dans son jardin ? C’était une faible chance, pourtant à peu près la seule, de lui parler en particulier ; mais comme je ne pouvais escalader le mur en plein jour, qu’il me fallait par conséquent passer par la maison, ou je devais rencontrer les membres de la famille, cela devenait absurde.

Que faire ?

Heureusement, à défaut de l’intelligence, l’instinct nous reprend. Après avoir longtemps marché sur la route, et malgré ces réflexions décourageantes, je revins par le chemin de la fontaine, sur la hauteur d’où l’on pouvait jeter les yeux dans le jardin des Ribas. Grazia n’y était point, mais Effisedda ; et comme cette fois elle était seule, — déjà des hypocrisies de jeune fille ! — elle vint à moi très vivement, jusqu’au bord du chemin. Je m’étais approché de mon côté. Gracieusement, elle s’accouda sur le mur.

— Qu’il y a de temps qu’on ne vous a vu !

— Nous sommes allés à la montagne.

Et je lui racontai notre rencontre avec les bandits, qui l’amusa énormément ; en la priant de n’en pas parler, ce qui la flatta encore plus. Dès lors, j’avais retrouvé toute sa confiance.

— Oh ! me dit-elle, d’un petit air important, il ne fallait pas en avoir peur ; les bandili ne sont pas méchants ; nous n’en avons pas peur, nous autres ; il y a parmi eux des amis de papa. C’est la justice qui est si mauvaise contre eux. Pauvres gens !

— Sais-tu, lui dis-je, ramenant la conversation à mes fins, que tu prends des airs de grande fille ? Tout à l’heure, en t’apercevant dans le jardin, j’ai cru voir Grazia.

— Oh ! je suis bientôt presque aussi grande, répondit-elle en se redressant.

— Mais n’était-elle pas avec toi, Grazia ?