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thésauriseurs. Le plus pauvre journalier économisera pendant des années pour pouvoir offrir les bijoux indispensables à sa fiancée. Il n’y a que du linge dans nos bahuts.

— Ainsi la belle Grazia n’aura pas de dot ?

— Pas que je sache, mais son trousseau sera magnifique et abondant. Le père y met son orgueil, et elle-même tisse à son métier les serviettes et les draps de son futur ménage.

— Vous êtes fort instruit ; seriez-vous l’heureux fiancé ?

— Moi ! dit-il en tressaillant, quelle idée ? Pourquoi pensez-vous cela ?

Il rougit en même temps.

— Je vous en ferais mon compliment. Elle est charmante.

— Vous trouvez ? dit-il, avec une satisfaction évidente, et il jeta les yeux d’autre part, avec plus d’embarras que d’indifférence.

— Allons, je vois que vous ne voulez rien me dire.

— Mais il n’y a rien, je vous jure ; voilà deux mois à peine qu’elle est de retour de Sassari. Je ne l’ai pas vue d’abord, étant allé passer une quinzaine chez un parent du Logudoro. Je me la rappelais à peine ; elle avait dix ans quand j’ai quitté le pays ; car j’ai cinq ans de plus qu’elle… une bonne et gentille enfant… mais je ne faisais pas attention à elle, alors…

— Et maintenant ?

— Et maintenant je suis de votre avis : c’est une charmante personne…

— Qui me paraît vous distinguer entre tous.

— Vous croyez ? dit-il en rougissant de nouveau, vous croyez cela ?

Et comme je me taisais, il reprit avec une curiosité, dont l’émotion passa dans sa voix :

— Qui vous le fait croire ?

Il m’a semblé.

Mais il ne voulut pas se contenter d’une si vague réponse.