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FEUILLETON DU SIÈCLE. — 17 MAI 1878.

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GRAZIA

RÉCIT D’UN VOYAGEUR
RECUEILLI PAR
ANDRÉ LÉO

X. — (Suite.)

Le repas fait, je pensais que nous allions partir, quand Effisio, qui était en veine d’audace et voulait servir ma curiosité, ouvrit un autre propos :

— Après un banquet entre bons compagnons, l’usage est de chanter ; mais nous n’avons pas de vin pour nous éclaircir la voix, et peut être avez-vous oublié les chansons de nos foyers ? Nous devrions plutôt nous raconter des histoires. Voici mon ami, qui est de Paris, et fort curieux des choses de notre pays. C’est un homme plein d’esprit ; il sait bien que les choses ne vont pas en ce monde partout du même train ni comme on le veut. S’il vous plaisait de lui raconter chacun votre histoire, il en serait content, et je pense bien qu’il voudrait ajouter aux provisions que j’enverrai un paquet de cigares pour chacun de vous.

À ce mot, les yeux s’ouvrirent : un paquet de cigares pour chacun d’eux ! Quel luxe et quelle source de jouissances ! Toutefois, la proposition était hardie, et à l’entendre plus d’un avait froncé le sourcil.

— Et pourquoi faire, ces histoires ? demanda le chef d’un ton brusque.