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lieu de ces grands bois clair-semés, où chantaient les merles et les tourterelles, où le geai, d’un air bon enfant, nous contemplait, perché sur les arbres du bord du chemin.

Puis nous chevauchâmes entre les murs de différentes tanche, vastes enclos où chaque pastorisia enferme ses troupeaux, par un mur de pierres sèches, haut d’un mètre à peine, appelé dans le pays muro barbaro. A gauche, des vaches levant la tête au dessus du mur, nous regardaient passer d’un air rêveur ; à droite, nous voyions paître des moutons ; plus loin, ce devaient être des porcs ou des chèvres ; car on ne mêle guère les espèces. Enfin, nous nous arrêtâmes devant une barrière. Effisio, sans descendre de cheval, l’ouvrit, et nous allons vers le covile[1], quand nous rencontrâmes le chef des pasteurs. Il eut à l’aspect d’Effisio un mouvement de surprise, puis vint à nous aussitôt.

— Soyez le bien-venu ! maître (padrone). Vous venez voir si tout va bien ?

— Oui ; il y a longtemps que je n’ai vu le troupeau. Et qu’y a-t-il de nouveau ?

— Il y a, dit le pasteur en se grattant l’oreille, que cette nuit les malfaiteurs nous ont encore volé un agneau. C’est le troisième depuis Pâques ; nous n’avons pas de bonheur.

— Et qui sont ces malfaiteurs, le sais-tu ?

— Oh ! maitre ! vous pensez bien que si je le savais, si j’avais vu ça, on ne me l’aurait pas pris ; non, non, je ne sais rien !

Il affirmait cola avec un tel désir de le faire croire que précisément on en doutait.

— Vous ne faites pas bonne garde.

— Si, padrone, vraiment si ! mais il faisait nuit noire et justement les agneaux s’en étaient allés sous les arbres ; nous les avons ramenés d’autre côté, mais trop tard. Ah ! si je les connaissais, les mauvaises gens ! Canaille, va ! toujours à l’affut pour dérober !

Quittant ce sujet le plus tôt possible :

— Il Giovannino Corrias est venu me de-

  1. Habitation des pasteurs.