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qui, chaque dimanche matin, s’étalait à mes yeux. Ce n’est pas qu’il y eût à lui faire aucun reproche. Elle mettait un soin touchant à promener ses doigts dans la chevelure de ses petits frères ou dans celle de ses parents, et c’est avec une grâce véritable qu’elle-même, à son tour dénouant ses longs cheveux, renversait sa tête sur les genoux de sa mère. La pose en elle-même était charmante, mais son but me faisait horreur, et mes préjugés de civilisé ne pouvaient en ce cas admettre l’union de l’amour et de la beauté.

Tel n’était pas l’avis de Pepeddo, qui paraissait très-épris de sa fiancée. Il élut domicile chez Cabizudu ; quand il y en a pour huit, il y en a pour neuf ; d’autant que de lit il n’était question. Le Sarde non marié couche à terre, avec la moindre étoffe, ou sa bestepedde, pour matelas. Pepeddo se louait à la journée, soit pour la moisson qui finissait, soit pour le battage des grains.

Les traitres ne me plaisent point, et pas plus que moi Effisio n’était sympathique à Pepeddo. Cependant, en considération de Cabizudu, qui le proposait sans cesse, on l’engagea dans la maison pour le battage ; il gagnait un franc cinquante, sans la nourriture.

— Oh ! la journée est chère ici, m’avait-on dit, quand je m’étais informé de ce détail.

Il est vrai que le Sarde pauvre vit de pain et de fromage.

Je rappelai alors à Effisio la promesse qu’il m’avait faite de me conduire à une de ses pastorisie, c’est-à-dire au pacage de ses troupeaux sur la montagne. Il n’y pensait plus, laissant aller toutes choses, mais à peine eus-je exprimé ce désir, qu’il fixa notre départ au lendemain matin, et sortit pour acheter les provisions nécessaires ; car on ne peut sans vivres aller trouver des hommes dont toute la nourriture se compose de pain et du lait de leurs troupeaux, rarement de leur chair.

Un détail, curieux pour nous, de la vie sarde, qui d’ailleurs est commun à tout le Midi de l’Italie, y compris la Sicile, c’est que