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FEUILLETON DU SIÈCLE. — 10 MAI 1878.

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GRAZIA

RÉCIT D’UN VOYAGEUR
RECUEILLI PAR
ANDRÉ LÉO

VII. — (Suite.)

Le dîner fut presque silencieux. Seules, dona Francesca et Grazia servaient à table. J’observai les convives : jeunes et vieux, tous avaient une figure solennelle et sombre, en accord avec la circonstance. Ce fut seulement après avoir servi le dernier plat, que de Ribas prit la parole :

— Mes parents et amis, vous savez pourquoi je vous ai rassemblés. Nous sommes sous la menace d’un malheur : Antioco Tolugheddu, mon gendre, ayant eu le tort de courtiser une jeune fille qu’il ne voulait pas épouser, Raimonda Nieddu, le cousin, Fedele, a déclaré la vendetta et rôde sur le chemin d’Oliena à Nuoro, les jours où Antioco vient chez nous ou en revient. Un jour ou l’autre, le coup peut avoir lieu. Que faire, à votre avis ?

— Il n’y a pas deux moyens, il me semble, dit aussitôt un homme de soixante ans environ, haut et robuste. Freddare (froidir) Fedele Nieddu avant qu’il ait pu froidir Antioco. Ton gendre n’a-t-il pas pensé à cela ?

Antioco allait répondre ; mais ce fut son père qui prit la parole :

— Si c’était là tout, dit-il, ce ne serait pas