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en lui des qualités que j’estime avant tout : la franchise, la générosité, une intelligence droite et compréhensive.

De quel doux regard je fus enveloppé ! Bien qu’il ne fut pas pour moi, je ne pus m’empêcher d’en être ému. Elle me demanda ensuite, non sans hésitation, ce que j’entendais par droits et compréhensive. Je le lui expliquai ; alors, elle parut tout à fait satisfaite, et je sentis, sans qu’elle eût besoin de me le dire, que je n’étais plus seulement son hôte, mais son ami.

Tout en me parlant ainsi, elle échangeait de temps en temps quelques paroles en sarde avec l’aïeule, comme si elle lui rendait compte de mes dires, et je m’aperçus bientôt, à la reprise des questions directes, que mon gentil interprète ne parlait pas toujours d’après lui-même.

— Et quel était mon état ? Mon âge ? Étais-je marié ? Avais-je encore mes parents ? Étais-je fiancé ?

La bonne femme n’oublia rien, sauf de s’enquérir du chiffre de ma fortune, question réservée sans doute, comme sacrée, mais autour de laquelle les autres tournaient. Je m’étonnais que l’aimable Grazia se prétât à cet interrogatoire ; car il y avait en elle une distinction naturelle qui me semblait comporter toutes les autres. Il fallait que la politesse sarde ne s’opposât pas à cela.

Je la regardais, elle et son costume, et les trouvais également poétiques. Elle portait le vêtement du pays, que j’avais entrevu déjà dans la rue, mais lui donnait une grâce toute particulière. Le corsage surtout était charmant. La chemise, échancrée en rond autour du cou et finement froncée autour d’une petite bande de percale brodée, était attachée sur le devant par un bouton double en filigrane d’or ; un corset, à peu près semblable pour la forme à celui de nos paysannes du centre de la France, mais d’étoffe de brocart et bordé d’un large ruban bleu, très échancré par devant, s’arrêtait de chaque côté au bord de la gorge, qu’il s’attachait à dessiner,