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bre au prédicateur et lui donnait à manger.

« J’étais nu, et vous m’avez donné des vêtements ; j’avais faim et vous m’avez donné à manger ; j’avais froid et vous m’avez réchauffé, etc.

Tel fut le texte du sermon que prononça le capucin, après avoir (promené du haut de la chaire sur l’assemblée des regards vindicatifs. Il y eut beaucoup de gens qui se regardèrent. Un grognement partit du chœur. Le sermon fut ce qu’on devait attendre ; la condamnation des gens de mauvais cœur ; l’éloge enthousiaste de la personne de bonne volonté, cachée sous les traits de la veuve charitable de l’Évangile, qui avait recueilli et nourri le capucin. Vers la fin, l’allusion était devenue si nette que le prédicateur ne prenait plus la peine de gazer sa reconnaissance et ses rancunes. On se regardait plus que jamais. Tout à coup, une voix retentissante part du côté du chœur. C’est le vicario, don Gaetano ; qui lance au moine cette apostrophe :

— Excusez, père Giovanni ! mais ce n’est pas un sermon que vous nous faites là ! Je m’y connais, quoi qu’on en dise. C’est tout bonnement l’éloge de comara Antonietta Saldi. Attendez un peu qu’elle soit canonisée !

Le prédicateur reste stupéfait et le rire prend tous les assistants, quand de l’autre bout de l’église, près de la porte, part une autre voix :

— Taisez-vous, homme scandaleux !

Tout le monde se retourne et j’entends répéter : il sindaco (le maire) et je vois un Sarde, aux yeux fulgurants, debout sur les marches de l’église, et qui ajoute, mais d’un ton plus bas, quelques paroles à l’adresse de ceux qui l’entourent.

— Taisez-vous vous-même, sindaco Lortu ; c’est vous qui êtes scandaleux ! Je n’irai point parler dans votre municipalité ; vous n’avez pas la parole dans mon église[1].

  1. Le fait est historique.