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sans péril. De toutes les plaines cultivées, et principalement des plus fertiles, s’élèvent des exhalaisons pestilentielles, sources de fièvres parfois mortelles, même pour les gens du pays. À Naples, à Florence, à Rome, tu trouverais ou la mal’aria ou des chaleurs telles qu’elles t’ôteraient tout le charme du voyage. Reste avec moi ! Ta seule présence peut m’aider à supporter le poids qui m’accable. Je ne t’ai pas caché mon espérance de ne point perdre Grazia pour toujours ; mais la savoir fiancée d’un autre, exposée aux tendresses de ce Tolugheddu, et s’efforçant elle-même de ne plus m’aimer, par l’idée qu’elle se fait de son devoir, cela par moments surmonte mon courage, et me rendrait peut être capable d’un coup de tête, si j’étais entièrement guéri. Je suis au milieu d’événements, où un bon conseil peut m’être bien nécessaire ! Vois-tu, j’ai dans les veines du sang de ce pays, et en même temps j’ai pris hors d’ici la conscience et l’esprit d’un civilisé, deux pôles différents, entre lesquels parfois j’oscille d’une manière cruelle. Si le mariage de Grazia s’accomplit, je ne puis rester ici ; j’y deviendrais fou ! Tu m’as proposé de m’emmener en France, je te suivrais alors. Si… ce mariage est empêché, tu peux m’être bien utile encore, je ne sais… Tout ce que je puis te dire, c’est que ce m’est un grand chagrin de te voir partir, et que, si tu n’as pas d’impérieuses raisons, il faudrait rester.

Il me parlait ainsi, les yeux pleins de larmes Je l’embrassai en lui disant que je resterais encore. Il avait raison dans ce qu’il affirmait. de Nuoro et des avantages que je trouverais à y passer l’été plutôt qu’ailleurs. Mais ma décision, je l’avoue, n’allait pas sans quelque dévouement. Après tout le pittoresque dont mes yeux avaient été frappés dès l’abord, je commençais à sentir le manque absolu e certains côtés de la civilisation, que j’apprécie fort, la propreté par exemple. À Nuoro, ce qu’on appelle les rues est orné de plus d’immondices que de pavés, et l’intelligente population, pour la plupart agri-