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FEUILLETON DU SIÈCLE. — 4 MAI 1878.

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GRAZIA

RÉCIT D’UN VOYAGEUR
RECUEILLI PAR
ANDRÉ LÉO

V. — (Suite.)

Nieddu, les yeux à terre, écoutait d’un air sombre ces paroles sauvages, où s’épanchaient encore les rages de l’amour. Il reprit :

— Eh bien, dis-moi tout ! T’a-t-il fait des promesses ?

— Il m’a promis le mariage ! s’écria-t-elle d’une voix éclatante, que par prudence elle ramena aussitôt au ton sourd où leur conversation s’était maintenue jusqu’alors.

Ils étaient arrêtés dans un endroit où la rue ne se continuait que par un mur d’enceinte d’un côté, de l’autre, par une maison à moitié bâtie, puis abandonnée, comme on en rencontre si souvent en Sardaigne, rêve inachevé d’un pauvre ambitieux, où l’herbe poussait.

— Et tu as pu le croire ! observa Nieddu d’un ton amer, quand il évitait de venir chez toi ?

— Il me disait que c’était à cause de son père ; mais qu’il l’amènerait peu à peu à sa volonté ; même, il m’a dit qu’il avait commencé de lui parler et que la chose n’avait pas été si mal prise qu’il l’avait craint ; mais qu’il y fallait du temps et une grande prudence.