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Afin d’établir entre eux l’entente nécessaire à leur œuvre, ne fallait-il pas s’interroger, se répondre, révéler ses idées, confier ses sentiments, joie profonde, quand de telles investigations n’amènent guère que des rencontres. Il fallut même correspondre, et nous devons avouer que le but fut quelquefois négligé pour les moyens, que le détail dépassa l’ensemble, et que, si l’entente et l’accord sont nécessaires à des coopérateurs, on joignit à ce nécessaire une étonnante richesse de superflu.

Peut-être, à les voir, le jeune homme et la jeune femme, s’égarer avec tant d’attrait dans les doux sentiers de la causerie intime, un sceptique, négateur de tout sentiment désintéressé, les eût-il accusés de ne chercher dans leurs projets bienfaisants qu’un prétexte à d’amoureux entretiens.

Il n’en était point ainsi dans leur pensée, et si les instincts de l’amour et de la jeunesse avaient pris part à l’inspiration de leur dessein, ce n’avait été qu’à voix basse, et si discrètement qu’ils n’avaient point été entendus. Mais d’eux-mêmes, en toutes choses, ces instincts éternels viennent mettre la main à tout ce que crée la raison humaine. Celle-ci, oubliant toujours de combien d’éléments multiples se compose la vie, coule silencieusement en bronze, ou sculpte de marbre sa création ; mais à cette forme immobile et roide les génies de la nature ajoutent chairs, couleurs, parfums, magnétisme, poésies, ciel bleu, fleurettes et gazon, larmes et sourires, tout ce que le grand forgeron sut mettre sur le