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ce que selon l’esprit qui les conçoit, il pouvait se faire, par suite, que ce qui était ne fût pas, et ce qui n’était pas fût : car le public savenaisien, habitué à recevoir des informations des lèvres de cette digne personne, donnait généralement force de croyance à ses jugements.


II.

La première chose que fit le docteur Émile fut de s’interroger sur l’emploi de sa journée : Je crois, se dit-il à lui-même en affectant le ton insouciant, absolument comme il eût pu faire vis-à-vis d’un autre, — je crois que j’ai promis de retourner au moulin.

Et là-dessus, tant son impartialité était grande, il se fit une objection : La meunière, après tout, n’était pas bien malade. — Mais il avait promis. Ces gens l’attendraient. — Oui, mais s’il allait encore y rencontrer Mme de Carzet ! Il n’avait pas le temps de causer tous les jours avec de belles désœuvrées. — Soit ; mais, puisque c’était le soir, à quatre heures, que cette jeune femme se rendait au moulin, il pouvait y aller plus tôt, et même dans la matinée.

Ce conseil fort simple, que sa raison lui fournit sans malice, et seulement parce qu’on l’interrogeait, parut déplaire au docteur, et, voyant ainsi tourner l’entretien, il le rompit ; car il n’avait pu s’empêcher de convenir en effet qu’il pouvait bien aller au moulin dans la matinée. Les circonstances toutefois en décidèrent autrement, et le docteur Émile ne les gêna point, au con-